Encore !
C’est une fois de trop ! En fin de bal un samedi soir, la Musique s’est
permis des réflexions au sujet de la Danse. La Danse a décidé d’avoir une
petite explication avec la Musique :
La Danse Au bal samedi soir j’ai été fort
surprise et déçue quand tu as fait une diatribe contre les bourrées
chorégraphiées. Tout au long du bal tu annonçais d’où venait le morceau joué et
le nom de la personne qui l’avait collecté et l’émotion était palpable. Et
puis après 4 heures de chouette bal, tu critiques les danseurs !
La Musique En bal, on voit que les modes et les
courants évoluent et c’est bien ; c’est signe que les danses et les
musiques vivent. Mais parfois les danseurs se lancent dans une démonstration « on
suit le troupeau » sans danser avec leurs tripes. De la scène où nous
sommes nous les musiciens, on les voit danser « comme au club » comme
s’ils faisaient un spectacle de groupe folklorique et cela crée un bal
« en vrac » où chacun fait sa « cuisine » bien apprise et
répétée scolairement.
La Danse Je constate que les bourrées sont
de plus en plus souvent dansées en rond, et parfois de façon quasi
systématique, ou bien par deux en grandes lignes. Dans
le Clunisois, à Blanot, des ateliers réguliers d’apprentissage de chorégraphies
de bourrées permettent d’avoir le choix de danser en rond, en lignes ou en
chorégraphies selon l’invitation de la musique.
La Musique Justement si les danseurs n’ont pas la
musique sur laquelle ils ont appris les figures, ils ne dansent pas. Et par
contre parfois, on annonce « Polka » et les danseurs dansent autre
chose car pour eux, peut-être, la polka c’est ringard, pas à la mode
quoi ! Et ils ne savent pas exploiter des pas de base pour prendre leur
pied à danser élégamment ou joyeusement, ou maladroitement peu importe, mais
sortir du « tout mâché »
La Danse Il faut du temps, de la musique
inspirante… et des pas… de danses avant une appropriation personnelle de la
danse. Et de même que la musique est colorée par le prisme de son interprète,
de même la danse est une expression personnelle différenciée. Et qui a besoin
de bals, stages et festivals pour pouvoir se peaufiner
La Musique Les stages et festivals – et j’en fais
beaucoup aussi ! – ont l’avantage de promouvoir la danse, mais du coup de
parfois l’uniformiser, la standardiser. Car le danseur-stagiaire applique
ensuite à la lettre sans piocher dans les éléments de base qu’on lui a appris
pour interpréter sa propre danse avec son style personnel. Une bonne illustration
en est la mazurka à la Gasconne (ou mazurka « algues marines » comme
je l’appelle) qui a complètement envahi les parquets et plus personne ne sait
la danser autrement ni écouter ce que dit la musique !
La Danse La musique inspire toute danse, car
la musique est une invitation à la danse. Je pense que la danse relève du
domaine de la sensation plutôt que du domaine de la compréhension. Et si la
musique est une émotion déclinée en énergie rythmique, la danse est la
traduction en mouvement de cette énergie, de cette émotion. « Ma
première idée du mouvement de la danse vient du rythme des vagues » comme
le dit si joliment la danseuse Isadora Duncan.
La Musique Et bien justement j’aimerais que les
danseurs sortent de la concentration, de la peur de louper leur chorégraphie et
plongent dans un élan communicatif avec les musiciens allant jusqu’à crier
pourquoi pas ! Pendant les cercles ou les bourrées c’est le silence, pas
de bazar, pas de cris, du coup les musiciens ne sont pas portés par les
danseurs. Je veux juste encourager les danseurs à sortir des conventions et à
se lâcher à danser joyeusement !
La Danse Je suis d’accord avec toi, un bal
est réussi quand la musique et la danse sont en communion et dialoguent
ensemble. Il faut pour cela que les danseurs entendent, comprennent et
ressentent la musique sans trop avoir à se poser de questions pour ne pas
bloquer la danse… mais pas trop peu non plus pour ne pas tomber dans la
routine… Là est toute l’alchimie d’un bal réussi : un bon dosage entre
connu et inconnu, la juste proportion entre le plaisir de « passer »
une chorégraphie et un accueil de la découverte
Le mot de la fin
revient à Yuri Buenaventura, chanteur colombien :
« Danser c’est comme parler en silence. C’est
dire plein de choses sans dire un mot
Isabelle